Est un western, avec la nature, le vent, la tempête, l’alcool, une injustice et une vengeance. Un polar aussi, avec un meurtre, un assassin, un escroc, un juge. Et pourtant un exercice de style, minimal et contraint, malin… (Mais j’ai l’impression que « malin » est l’adjectif générique pour les écrivains actuels des Éditions de minuit.). Déposition, confession ou témoignage, c’est surtout un morceau d’écriture, presque-chant, longue complainte de l’innocence coupable à double titre, triple même si l’on ajoute la métaphore historique de la corruption des gens de gauche à la fin du XXe siècle. Mais c’est avant tout un western (ou un vieil Almodovar) qui cautionne la vengeance contre l’injustice… Mais comme c’est une vengeance de classe… On hésite, moralement, comme le juge… Car c’est un dilemme moral presque sur le ton de la plaisanterie. Enfin, dilemme… Que le juge-écrivain absolve dès le titre cette innocence coupable n’est pas sans conséquence morale. C’est troublant, malsain au final, parce que cette innocence n’est pas si innocente et que le coupable originellement coupable, l’escroc, est traité comme une force corruptrice quasi naturelle, quasi accidentelle, comme une tempête en mer, comme une puissance occulte qui ne dévie jamais de sa route, inconsciente aux trop humains qu’elle écrase sur son passage. Western donc, peut-être aussi parce qu’on y retrouve la paranoïa des fictions américaines, et cette conception mystique du mal comme essence, comme absolu altérité. Et la caution de l’autodéfense sous le couvert d’une parabole sociale. Mais comme avec un bon polar classique, on s’en fout, puisque le plaisir et de l’écriture, et de l’esprit est là.
Article 353 du Code pénal, mon second Tanguy Viel
Publié le 25 août 2018