Dans la série, « les mystères de ma psyché », ce soir, je me lave, tranquille, pénard, et PAF ! Une question que me posaient les premiers strips de Mickey, bloquée quelque part dans les limbes depuis aout 2012, se résout, d’un bout à l’autre… Et en prime, des considérations plus larges et un poil de vocabulaire. Ressors vite de la salle de bain, fébrile… et note « continuum culturel »/« Champ culturel ». Le passage d’un médium à l’autre, ici le passage de Mickey du dessin animé à la BD, met en lumière (formellement, dans la maladresse des premières adaptations) l’envergure sémantique (pas le terme, mais en attendant) d’une œuvre. Son aura historique ? Du moins quelque chose comme l’envergure de son « continuum culturel », et donc sa capacité à s’extraire de son contexte d’apparition géographique et historique. Quelque chose comme ça. Et ensuite, s’interroger sur les liens entre littérature et cinéma, etc. Le passage « conjoncturel » d’un médium à l’autre, que l’on nomme adaptation, devient l’indice (indicateur ? Étalon ?) de la capacité d’une œuvre à excéder son époque. Comme si c’était un point d’articulation fragile, exposé.
Continuum culturel ? Ainsi, Sappho (utilise toujours elle) lorsqu’elle s’adresse à la postérité, à moi, s’exprime dans un continuum culturel qui englobe l’entièreté de la culture occidentale, et plus, en fait, car elle parle dans le cadre d’un universel de la culture humaine : l’apparition systématique du fait poétique dans un même contexte socio-économique, quel que soit le lieu et l’époque. C’est-à-dire comment l’on passe du conte, de la mythologie à la poésie lorsque les conditions économiques et organisationnelles de la société le permettent. Donc, le continuum est, pour Sappho, si large qu’elle me parle encore. Je comprends ce qu’elle dit, je comprends la frustration de la femme persécutée pour ses orientations sexuelles, et je comprends ses pulsions d’expression… Je ne comprends plus rien des architectures monstres commandités par des tirants psychopathes avec qui je ne partage rien. Leurs continuums culturels étaient historiquement minuscules (ils s’adressaient à eux-mêmes pourrait-on dire), et de la même manière, le livre que j’ai commencé hier, qui s’adresse à MA génération, ne sera plus compréhensible dans dix ans… À relier avec les théories sur la traduction d’Umberto Eco, sur l’incapacité de comprendre « dans sa totalité », une œuvre littéraire du XIXe siècle, et même, progressivement, du XXe… Mais un soldat grec qui écrit un poème d’amour avant de succomber sur le champ de bataille, je le comprends encore, car il crie dans un continuum culturel à l’échelle de l’humanité.
Et tout ça, parce que les premiers strips de Mickey ne sont pas lisibles si l’on n’a pas vu les dessins animés. Ce sont des œuvres « secondaires », au sens de George Steiner, ou des hypertextes, mais plus encore des œuvres parasites qui ne peuvent exister qu’en commentaire de l’œuvre véritable, l’animé…
Calmons-nous. Argh ! je montre comment marche mon cerveau : un machin brouillon qui va chercher des éléments disparates, très lointains parfois, pour en faire une sauce étrange…
j’en pleurerais. (j’efface ce qui devrait s’inscrire).
Moi qui ne m’adresse même pas au « moi » de dans un mois, parfois…