Je suis en haut de quelque chose. Je pourrais glisser, là, ou là, mais je me tiens debout. Je pourrais glisser, mais c’est le rire qui vient. Je suis debout, là, et je mesure ma dette à la profondeur de l’abîme. Je te dois ça.
« J’étais un saltimbanque, tu sais, je ne suis pas très… » « Mais tu es toujours un saltimbanque » je la regarde, étonné, et me sens si bête, si bête. Oui, je le suis toujours. Alors qu’est-ce que je fais là ? Qu’est-ce que je fais là ? Je suis pris d’une étrange honte, de m’être oublié à ce point, de m’être laissé castrer sans rechigner. Je me tire les tarots, comme dans les pires moments, et ils disent « tu as fait un long pèlerinage, mais il est terminé. Tu dois maintenant rentrer chez toi. Tu es attendu » OK. Personne ne m’attend, mais je rentre chez moi.
J’invite. Ça fait si longtemps que je n’avais pas invité… Quelques-uns oralement, peu par mail, beaucoup par facebook. Heureusement, j’ai encore quelques copains ici. Mais en faisant le tour des invitations, je me rends compte que la majorité de mes contacts, des gens avec qui je discute régulièrement, simplement, sont géographiquement très loin. Je ne peux pas les inviter pour passer boire un coup. Et je suis obligé de faire un effort mental pour me dire, ha non, il ne passera pas, il ne va pas faire 15 000 kilomètres pour un verre de vin discutable… C’est le monde dans lequel nous vivons maintenant. Il n’y a plus de géographie, jusqu’à ce que tu veuilles trinquer. À quoi ? Ha ha ha à quoi. À un nombre incroyable de choses. Trop, pas facile de dire à quoi. Mais à qui, je sais.