Rien n’est plus amusant que la maladresse, rien n’est plus ennuyeux que la maîtrise. Baisse la tête et recommence.
Rester un apprenti. Accepter le geste gauche, mais tendu d’une belle volonté, qui accepte d’être instantanément remplacé par un geste neuf.
J’étais l’apprenti de mon père. Ce n’était pas si désagréable. Même si j’aurais préféré courir ailleurs parfois. Je taillais les chevilles. « C’est le travail de l’apprenti ». Je taillais les chevilles, le fil du bois, j’aiguisais les outils avec la grande meule, le fil du fer. J’ai les odeurs dans le nez, et les sensations dans les doigts. Les odeurs dans le nez, les sensations dans les doigts.
La première fois que tu oses glisser ta main dans la culotte d’une fille. En fait, ça commence presque toujours comme ça. Ce qu’il y a avant n’est pas très engageant. On n’en retire aucune odeur, aucun goût (Celui du dernier Chewing-gum ?). Ça commence vraiment quand les choses ont un goût, qu’une odeur te reste dans le nez. Là tu sais. Tu sais si tu auras le goût, le goût d’y revenir, ou si c’est pas ton truc. Tu sauras autour de quoi ta vie va tourner. Tu te souviens, de la lecture du merveilleux Henry Miller, de son doigt qu’il ne lave pas, pour le sentir dans le bus, sans que les gens autour ne se doutent de rien, comme tu le comprenais, en le lisant. Comme tu le comprenais, apprenti.
Rester un apprenti. Arrêter de geindre.
Et sourire en sentant son doigt.