Dès les premières pages de ce « triangle d’hivers » de Julia Deck, suspectant quelque chose, par l’écriture, intuition, je décide d’écrire ce billet au fil de ma lecture, notant ainsi mes évolutions de perception :
Une écriture agréable, qui roule tranquille, mais ironique. Un personnage féminin sorti droit du cinéma français des années 80. Pourtant parfaitement d’aujourd’hui, mais peut-être que le cinéma a abandonné ces femmes-là ? Enfin, voilà, maintenant je ne demande pas grand-chose sinon d’être emporté par l’écriture. C’est fait.
Pourtant, rapidement, je passe d’un film « social » des années 80 aux ingrédients exacts d’une romance bas de gamme. Et normalement je devrais décrocher là, sauf que l’écriture reste, avec une réelle capacité à raconter sans jamais perde de son acidité, sans jamais perdre sa distance ironique pas désagréable qui semble dire « attend, ne juge pas trop vite cette gonzesse qui “ressemble à Arielle Dombasle jeune (sic !) et qui croise systématiquement des mecs beaux et bien bâtis qui bossent sur des bateaux”. Franchement ? Bon, alors, continuons.
(C’est une question que je me pose parfois : quand les ingrédients sont mauvais, est-ce que la sauce arrange tout ?)
Ensuite, il y a l’écho, l’écho avec le cinéma, et l’enfermement dans l’imposture. Mais ça aussi l’imposture, c’est un ingrédient avarié, gâté, bas de gamme… Pourtant, il reste des indices, le jeu sur « inspecteur » et puis, comme l’intelligence de l’écriture le laisser espérer, une « ironie globale » devient probable… avec ce bateau, « première étoile du grand chien », qui revient toujours.
Et lentement, le fantasme du personnage s’effritant, et devant l’innocuité de la parano de son amant, devant l’imposture à vide, sans raison ni projet, une vérité s’infiltre. À chaque chapitre, le roman glisse vers autre chose, subtilement, comme un changement d’état mental, et bascule doucement vers une histoire de résistance, de résistance passive, de pesanteur et d’inertie, et enfin de mise en crise des injonctions sociales.
Ou comment un personnage très simple, presque sans motivation propre, peut gripper la machine et démontrer comment nous sommes entrés dans un monde qui nous demande constamment de nous justifier d’être…
Conclusion :
J’irais voir les autres livres de Julia Deck.
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